Claude MINOIS vers 1875
Fils de Paul MINOIS et Marguerite MAILLET, né à St-Éloy-de-Gy (Cher) le 11 novembre 1827, il décède à Nouan-le-Fuzelier le 21 mai 1909, à 81 ans, certainement dans la gare qui était le logement de fonction de son fils Thomas qui était chef de station.
« 1m 66, cheveux et sourcils blond foncé, yeux « gris roux », front étroit, nez relevé, bouche petite, menton rond, visage rond » (sources : Certificat de bonne conduite, 3 octobre 1855, Sébastopol, Congé de Libération, 10 novembre 1855, Gap).
Issu d'une famille de petits propriétaires terriens et de laboureurs, il effectue son service militaire à Paris en 1848 : Grenadier au 21ème de lignes, 1er bataillon à Paris.
Le 18 juin 1848,il part pour la Crimée. où Claude rédige un carnet dont voici les principaux extraits :
« Départ pour la Crimée.
Parti pour Varna Turquie le 18 juin 1854, arrivait le 26 à 6 heures du soir.
Rester a Varna jusqu’au 10 septembre 1854.
Parti le 10 pour Sébastopol arrivait le 16 à 4 heures du soir. Commandés pour le travail à 6 heures pour la Batterie n° 6, Batterie de marine. C’est là que j’ai eu le plus peur de ma vie.
Pour étrennes les russes nous ont salués d’une manière très reconnaissable.
Et puis voyant tant de morts et de blessés qui passaient près de nous.
Enfin, j’étais déjà content pour la première fois je commençais déjà à penser à mon pauvre pays et à mes pauvres parents que je ne devais plus voir jamais. (…).
Première attaque que les Russes ont faite sur nous.
Le 5 novembre 1854 à 5 heures du matin.
Toute l’armée d’observation russe se précipite sur le camp des anglais s’y trouvant même jusqu’au point de ne pouvoir plus se défendre mais aussitôt nos deux premières divisions se sont portées au pas de course pour repousser les russes d’une manière extraordinaire. Enfin une attaque générale a eu lieu ce jour-là sur toute notre armée.
Affaire du 22 au 23 mai 1855 Nous avons fait une attaque chez les russes croyant de leur prendre le cimetière mais comme nous n’étions pas assez nombreux nous avons été obligés de rentrer chez nous avec une grande perte de douze cents homme sur dix mille combattants que nous étions. Du 23 au 24 nous avons recommencé le même trajet mais une force plus nombreuse, mais aussi nous les avons fait débusquer lestement de leurs tranchées comme des lâches qu’ils sont. Notre perte a été de 5 cents hommes et nous avons pris possession du cimetière et nous avons avancé plus loin. »
Le 18 novembre 1856 il reçoit la médaille de Crimée. Il s'agit d'une médaille commémorative britannique, décernée par la reine Victoria, aux officiers, sous-officiers, soldats et marins de tous grades ayant participé à la guerre de Crimée du 14 septembre 1854 au 8 septembre 1855. La France ne possédait pas à cette date de médaille commémorative de campagne. Aussi, la médaille de Crimée britannique, fut reconnue par le gouvernement français par décret du 26 avril 1856. Elle a été attribuée à tous les militaires français ayant participé à cette campagne, et son port autorisé. Le nom du récipiendaire peut être gravé sur la tranche, souvent avec indications du grade et unité d'appartenance.
En 1854, il est contremaître à la Colonie du Val d'Yèvre au Chemin de fer du "P.O." (Paris Orléans).
"C’est que le chemin d’Orléans ouvre à l’industrie une ère nouvelle (…) C’est un premier anneau de cette chaîne immense qui doit relier le Nord au Midi, Bordeaux et Nantes, nos deux grands ports de commerce, au Havre et à la Belgique (…) c’est en 1838 que fut votée la loi qui concédait le chemin de fer de Paris à Orléans, avec embranchement sur Corbeil, Pithiviers et Arpajon. Le maximum des pentes et rampes était fixé à 3 millimètres par mètre, et le minimum du rayon des courbes à 1 000 mètres. La Compagnie constituée au capital de 40 millions, se mit immédiatement à l’œuvre (…)"
(L’Illustration, 4 août 1843).
Bouton d'uniforme du P.O.
Il a donc appris à lire et à écrire au service militaire. Grâce à cela, outre quelques récits sur la guerre de Crimée, il note dans un carnet (publication à venir j'espère) les progrès de la construction du PO.
Dans un autre document il note des anecdotes sur sa famille, les événements politiques ou de la vie quotidienne qui l'ont frappé. Par ailleurs, il a recopié l’histoire des archers écossais qui ont accompagné les Stuart et aidé Louis XI et Charles VII dans leur reconquête du pays. Jacqueline Minois Peillot-Frandet, son arrière-petite-fille (ma mère ) disait que les Minois descendaient de ces écossais et que ses deux aïeux en avaient l’œil clair, les cheveux blonds et le menton carré. Hypothèse avérée puisque l’une des ancêtres s’appelle Jeanne Cocu. Les Cocus sont dans le Berry des descendants des Cook ! Quelques extraits des faits qui l’ont marqué : « Le 11 mai 1879, acheté une toile cirée pour la table. 1 mètre 17 de long et 80 de large. Coût 2 francs 85 centimes chez Monsieur Lavex à Bourges » « Le 11 mai 1879 touche quatre cents francs du père Clément comme indemnité pour la Marie. » « Savigny en Septaine, le 14 février 1878. On réédite en ce moment la curieuse prophétie suivante qui date de 1523 : « vers la fin du dix-neuvième siècle il y aura des Républiques en Suisse, en France, en Italie ; des signes dans tout l’univers, des pestes, des guerres, des famines, des grandes villes seront détruites, des rois, des prélats des religieux seront tués. Vainqueurs dans la première lutte, les ennemis de Dieu seront vaincus dans la seconde. L’Eglise sera dépouillée de ses biens temporels, le Pape sera tenu en captivité par les siens, le siège de Pierre deviendra vacant, il n’y aura pas de Pape, mais l’élu de Dieu viendra du rivage avec lui. » « Le 7 janvier 1879 tombe de la neige et du verglas pendant 30 heures. Les arbres étaient tellement chargés que toute les branches cassaient surtout les peupliers ainsi on n’avait jamais vu pareille chose, ainsi le meunier du Villebeauf ( ?) il avait un homme de journée pour retirer les branches de la rivière venant de tous les arbres le long de cette rivière. Aussi les trains, ils ne pouvaient plus circuler d’Orléans à Paris et le 8 ils ne pouvaient même plus venir à Vierzon. Dans beaucoup de tranchées il y avait 1 m 50 de neige. Presque tous les poteaux télégraphiques et beaucoup de fils étaient cassés par la grande charge du verglas et du givre. En 79 une très mauvaise année, un bon tiers de blé de moins que les autres années, pas de noix. Pas de fruits (de) n’importe quelle espère presque toutes les vignes elles ont la maladie presque pas de raisin. On va vendanger très tard. Nous voilà au 15 octobre le raisin est toujours vert (ou rien que et un peu). Le mois de décembre 1879 très mauvais une grande quantité de neige à partir du 2 jusqu’au 28 et une gelée comme on a jamais vu. 25 à 26 degré de froid à Bourges et aux environs ainsi on avait beaucoup de peine pour décharger (?) puisque toutes les pommes de terre ont gelé. Le vin dans les caves gelait une grande quantité d’arbres ont gelé. 1893, très mauvaise récolte, les bestiaux ont beaucoup souffert. La paille, elle se vendait 45 à 50 f les 500 kg, le foin 90 à 100 f, tous les bestiaux couchaient sur le pavé. En échange 1894 une très belle récolte comme on ne voit pas souvent ». Il s’intéresse également à la politique et note parmi les nouvelles familiales, la mort de Napoléon III, de Bazaine, de Thiers ; la démission de Mac Mahon, et l’arrivée de Jules Grévis, la mort de Gambetta (et les conditions de son enterrement à Nice), celle du Comte de Chambord, de Sadi-Carnot. Enfin, il suit de près le service militaire ! Il recopie un extrait de « la loi militaire du 27 juillet 1872, tout français qui n’est pas déclaré impropre à tout service militaire fait partie de l’armée active pendant 5 ans, de la réserve de l’armée active pendant 4 ans, de l’armée territoriale pendant 5 ans, de la réserve de l’armée territoriale pendant 6 ans, Art. 36 de la durée du service, compte du 1er juillet de l’année du tirage au sort » A propos de son beau-frère, Gabriel Petit, il note « la dernière classe qu’il a fait 7 ans de service, la classe 1866 depuis 5 ans et depuis 1890 3 ans. Les soldats ont même le temps d’apprendre l’exercice, ils sont tous les 15 jours en perm ».
Il s'est marié, à 30 ans, le 29 juin 1858 à Moulins-sur-Yèvre (Cher) avec Jeanne PETIT.
Jeanne PETIT vers 1875
Jeanne PETIT, garde barrière, est fille de François PETIT et Margueritte Catherine RETY, née à Moulins-sur-Yèvre le 30 juin 1837et décédée à Savigny-en-Septaine (Cher) le 24 mars 1880, à 42 ans. Comme pour tous les conjoint(e)s de mes portraits, je reviendrai sur leur histoire, notamment au travers des noms de famille ou métiers ou autre point intéressant.
" C'est elle qui est chargée de la surveillance des passages à niveau et de la fermeture de la barrière, quelques minutes avant le passage des trains.
Elle a 200 à 300 Fr. d'appointements, une petite maisonnette et un jardinet. Entre deux convois, elle veille à son ménage, aime son mari, fait des enfants, les allaite, les élèves, les marie et s'endort du sommeil éternel après avoir vu le monde passer sous ses yeux, mais sans l'avoir connu"
(Edouard Siebecker "Physiologie des Chemins de Fer, 1867, Ed Hetzel, Paris).
Quelle chance d'avoir ces récits des mains de ton ancêtre. J'aurais tellement aimé hériter de tels écrits... mais malheureusement mes ancêtres n'étaient pas très loquaces !